Pour faire face à l’épidémie de COVID-19, les entreprises qui le pouvaient ont eu recours massivement au télétravail. Cette période a été un accélérateur pour les nouvelles organisations du travail et les nouvelles pratiques managériales. Véritable exception avant la crise sanitaire (en 2017, 3% des salariés le pratiquaient une fois par semaine selon la DARES), le télétravail serait plébiscité aujourd’hui par 40% des actifs (sondage Opinionway). En France, nous savons que 8,5 millions d’emplois pourraient être concernés par le télétravail. Retour sur les fondamentaux du télétravail et ce qui a changé avec la crise.
LE TELETRAVAIL EN TEMPS NORMAL
Le télétravail, quelle définition ?
«?Le télétravail désigne toute forme d’organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l’employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon volontaire en utilisant les technologies de l’information et de la communication.?» (article L 1222-9 du Code du Travail)
Le télétravail peut donc être soit une demande du salarié, qui peut avoir le besoin de travailler à distance pour des raisons de santé, d’organisation personnelle, de situation géographie, ou pour toute autre raison sociale, économique ou environnementale. Le télétravail peut également être la clé d’un meilleur équilibre entre vie personnelle et professionnelle.
Il peut également répondre à une demande de l’entreprise, si les locaux ne permettent pas d’accueillir tout le monde ou si le travail doit se faire à distance.
Il peut enfin devenir une obligation dans certains contextes comme c’est le cas depuis un an avec la crise sanitaire.
En tant qu’entreprise, comment mettre en place le télétravail ?
Avec les ordonnances sur le renforcement un dialogue social, la mise en place du télétravail a été simplifiée. Elle donne le droit aux salariés de télétravailler, si et seulement si son travail peut être effectuée à distance. Il n’y a plus obligation de modifier le contrat de travail suite à une demande de télétravail, que ce soit de l’employeur ou du salarié.
Il y a 3 manières différentes?de mettre en place le télétravail :
- Un simple accord entre le salarié et l’employeur, qu’il soit écrit ou oral (d’après l’article L. 1222-9 du code du travail), à la demande orale ou écrite de l’un ou de l’autre?;
- Un accord collectif, qui doit préciser les postes éligibles, les conditions de mise en place et d’arrêt du télétravail, le mode de régulation de la charge et du temps de travail ;
- Une charte unilatérale élaborée par l’employeur, qui doit préciser les mêmes éléments que l’accord collectif.
Quels sont les droits et les obligations de l’employeur??
- Refus du télétravail?:
L’employeur a le droit de refuser d’accorder au salarié de bénéficier du télétravail mais sa décision doit être motivée. De même, il ne peut pas imposer le télétravail au salarié d’après l’article L. 1222-9 du code du travail qui prévoit que le refus de télétravailler n’est pas un motif de rupture du contrat de travail.
- Ancienneté?:
L’employeur peut exiger une durée d’ancienneté pour que le salarié puisse bénéficier du télétravail. Cette condition doit être précisée dans l’accord ou la charte unilatérale permettant la mise en place du télétravail.
- Télétravail à durée déterminée?:
L’employeur peut prévoir un avenant autorisant le télétravail à durée déterminée, mais également une clause précisant que le salarié ou l’employeur restent libres de mettre fin au télétravail en cas de nécessité de service, difficultés liées au réseau, etc.
- Indemnisations?du télétravailleur (eau/électricité/internet)?:
Aucune disposition législative ou réglementaire n’existe sur ce point, mais un accord d’entreprise pourrait prévoir ce type d’avantage.
- Conformité et ergonomie du poste de travail?:
Au titre de son obligation de sécurité résultat, avant de mettre en place le télétravail, l’employeur doit s’assurer de la conformité des installations électriques et des lieux de travail et fournir les équipements nécessaires au télétravail. Les dépenses liées à l’aménagement de l’espace de travail et à sa mise en conformité sont prises en charge par l’employeur. Pour des raisons pratiques, le plus souvent, une attestation de conformité par le salarié sera demandée.
Il est légitime pour l’employeur de mettre en œuvre une démarche d’analyse des besoins de chacun des télétravailleurs et il est conseillé de la présenter comme un appui pour l’amélioration des conditions de travail. L’aménagement peut se faire à la maison comme sur le site habituel de travail. Il est conseillé au mieux d’aménager l’espace de travail avec des outils tels que le siège ergonomique, l’écran fixe, le clavier et la souris ergonomique, surtout en ces temps où l’activité de télétravail en situations contraignantes pour les salariés s’accroit.
Quels sont les droits du télétravailleur ?
« Le télétravailleur a les mêmes droits que le salarié qui exécute son travail dans les locaux de l’entreprise » (art. L. 1222-9 du code du travail), c’est-à-dire :
- Accès à la formation
- Respect de la vie privée
- Droit à la déconnexion
- Santé et sécurité au travail
- Accès aux activités sociales de l’entreprise, aux informations syndicales, aux avantages sociaux.
Comment prévenir les accidents du travail à domicile??
En cas d’accident sur le lieu de télétravail, le salarié est toujours couvert par le régime des accidents du travail selon l’article L. 1222-9 du code du travail.
Pour prévenir ces accidents, l’employeur peut veiller à la conformité du lieu de télétravail comme vu précédemment. Il peut également mettre en œuvre des dispositions relatives au droit à la déconnexion. Enfin, il peut rappeler dans l’avenant au contrat de travail le respect des horaires hebdomadaires, des temps de pause et des temps de repos.
En cas d’accident du travail, souvent, il est précisé dans l’accord d’entreprise ou dans la charte unilatérale, qu’un membre du CSE ou CSSCT puisse se rendre au domicile du salarié, avec son accord pour «?regarder?» les conditions dans lesquelles sont réalisées le télétravail.
LE TELETRAVAIL EN TEMPS DE COVID-19
L’obligation de mettre en place le télétravail
Ci-dessus, nous avons indiqué que le télétravail ne pouvait pas être une obligation ni pour le salarié, ni pour l’entreprise. Cependant, dans ce contexte exceptionnel qu’est la crise sanitaire, le télétravail peut être imposé dès lors que ses activités le permettent. L’article L. 1222-11 du Code du travail indique que le risque épidémique peut justifier le recours au télétravail sans l’accord du salarié. Cela va même plus loin, puisque lorsque c’est possible, le télétravail doit être mené à 100%. L’objectif est de protéger la santé des salariés et de ralentir la propagation du virus de la Covid-19.
En revanche, certaines activités ne sont pas adaptées au télétravail et l’employeur peut alors refuser de le mettre en place. Il s’agit d’activités qui nécessitent de se rendre sur des lieux spécifiques comme l’aide à la personne ou le travail sur des chantiers par exemple.
Même si la tendance est à la généralisation du télétravail à 100%, une tolérance est exercée pour les personnes isolées, pour qui c’est une souffrance de ne pouvoir entretenir un lien social. Dans ce cas, l’employeur peut autoriser le salarié à venir certains jours sur son lieu de travail.
Selon le Ministère du Travail les employeurs fixent les règles applicables dans le cadre du dialogue social de proximité, en veillant au maintien des liens au sein du collectif de travail et à la prévention des risques liés à l’isolement des salariés en télétravail.